All posts by “Yoann Lelong

comment 0

Maxime Delpierre

La vidéo donne à percevoir la création. Elle montre le musicien Maxime Delpierre entrain de créer un morceau. L’objet de ce projet n’est pas de suivre la composition d’uen oeuvre dans son intégralité mais plutôt de montrer les insaisissables moments de recherche qui amène un morceau.

Maxime Delpierre est un compositeur et guitariste. Après une carrière en tant que guitariste au sein de nombreuses formations de jazz(dont Limousine), c’est avec son ami d’enfance Thomas de Pourquery qu’il crée le groupe VKNG. Par la suite,  il officie comme réalisateur et arrangeur aux côtés de Rachid Taha, Rodolphe Burger, Oxmo Puccino, Damon Albarn, Mick Jones, Jeanne Added, Flip Grater ou encore Alice Lewis.

La vidéo Maxime Delpierre peut  être penser comme la documentation d’une création ou un simple objet musical. Pourtant son essence est autre. Elle interroge notre perception du temps et, par ricochet, l’essence d’une création.

La vidéo invite les regardeurs à se frayer un chemin dans la multiplicité des hétérogènes et à penser le « tout ensemble ». Elle propose d’abandonner les constructions et déconstructions qui ont fondées notre pensée pour un amas d’éléments inconstruits et sans architecture.   Elle amène à penser dans le « non bâti », le « non édifié » et le « non édifiant ».

 

Dans le monde étranger

Dans le monde étranger, vidéo hd, 13 min.

Paul Audi caractérise l’adolescence par un drame métaphysique lié à la « première confrontation » de l’individu avec la finitude humaine. C’est la période durant laquelle il se heurte au poids d’un réel non apprivoisé et étranger. L’adolescent doit à la fois s’approprier un monde reçu en héritage et se définir comme un individu à part entière. Il se construit, s’adapte et se projette dans un contexte donné afin d’exprimer sa volonté d’existence. Cette partie de jeunesse est celle des idéaux, des désillusions et de l’insouciance. Elle est le point de départ de la régénérescence de l’élan vitale de la société. Mais comment s’exprime-t-elle dans un monde malmené par les différentes crises ? 
 
Le musicien Marc Leroy accompagne les élèves du collège Pierre Reverdy à Sablé-sur-Sarthe dans la création d’une chorale. Chaque année, des élèves allant de la 6ème à la 3ème chantent des textes soigneusement choisies et orchestrés par celui-ci. Les adolescents s’approprient ainsi des thématiques traitant de l’écologie, de la différence, du rejet, du racisme et autres.  Ces jeunes personnes scandent d’années en années leur incompréhension du monde dans lequel ils sont nés. Leurs mots résonnent habituellement dans le grand théâtre du collège mais pas en 2021. 
 
La chorale 2021 est tronquée par une crise sanitaire qui obligent les élèves à chanter avec des masques et dans le CDI surchauffé par les projecteurs. Le contexte est lourd et difficile. Ils doivent pousser leurs voix. La chaleur omniprésente éreinte les adolescents qui enchainent les prestations. Certains vacillent tandis que d’autres quittent temporairement l’ensemble pour récupérer. Néanmoins la représentation tient.
 
Dans le monde étranger symbolise une jeunesse qui chercherait à exister et à être écouter. Les élèves vont évoluer dans un monde qui doit probablement se redéfinir et peut-être se déconstruire. Ils protestent, se révoltent ou se résignent dans l’indifférence générale. L’avenir s’effrite mais leur élan vital perdure … mais pour combien de temps ?

 

Struction

Struction, vidéo hd, 23 min.

Struction est une vidéo. On peut la penser comme la documentation d’une création ou un simple objet musical. Pourtant son essence est autre. Struction interroge notre perception du temps et, par ricochet, l’essence d’une création.

Le temps semble coupé en deux, par deux sortes de pondérations que le présent démarque, sépare et oppose (le passé et le futur). Cette représentation « fléchée » semble n’être qu’un simple effet de perspective qui masquerait une autre structure ou non structure. Selon les sciences, tous les événements, qu’ils soient passés, présents ou futurs, coexisteraient et s’influenceraient les uns, les autres. Si cela était le cas, comment devons-nous penser la création ? Comment devons-nous penser le monde ?

La vidéo Struction met en exergue la création du nouvel ep de producteur Jérémy Chatelain. Celui-ci s’est contraint à créer l’ep en une unique session d’enregistrement. Au-delà de l’aspect performatif, on y perçoit un artiste qui joue avec les temporalités en contractant les éléments passés & futurs.

Struction (c’est-à-dire en latin : les amas, les tas) invite les regardeurs à se frayer un chemin dans la multiplicité des hétérogènes et à penser le « tout ensemble ». La vidéo propose d’abandonner les constructions et déconstructions qui ont fondées notre pensée pour un amas d’éléments inconstruits et sans architecture.   Struction amène à penser dans le « non bâti », le « non édifié » et le « non édifiant ».

 

Asphyxia

Asphyxia, série d’images.

La série interroge les dispositifs de pouvoir qui s’opèrent au sein des quartiers populaires. Les personnes qui y sont issus naissent dans des espaces assujettis à des systèmes de domination qui vont les conditionner à mener des existences sous surveillance. Dans les espaces publiques ou dans les institutions qu’ils fréquent, ils vont adopter des comportements conditionnés par les formes de domination qui s’exercent sur eux. Car ces dispositifs de pouvoir (sens foucaldien) créent des identités qui paraissent objectives et naturelles, mais qui sont pourtant le corrélat d’un « enchevêtrement » politique du corps, d’une distribution des individus. Ainsi un enfant qui nait dans un quartier dit « populaire » se conformera à des attentes et des pressions insidieuses qui s’exerceront sur lui. Il évoluera dans un « système d’asphyxie où l’ordre social restreindra son espace de vie, limitera son espace mental et sa vision du monde. Il aura de forte chance de ne pas correspondre aux attentes du système scolaire et se confrontera plus en plus aux systèmes répressifs de son quartier » (G. de Lagasnerie / A.Traoré). 

comment 0

Ainsi parlait Bangoura

Ainsi parlait Bangoura, vidéo hd, 10 minutes, Couleur.

Angela et Marius, deux jeunes étudiants, ont accompagné un jeune migrant lors de son arrivée en France. A travers leur récit, nous découvrons le périple de Bangoura, jeune guinéen ayant fui son pays lorsqu’il avait 17 ans. Sur une production musicale composée de samples (issus de musiques traditionnelles des différentes immigrations françaises), l’œuvre questionne la manière dont chacun de nous se réapproprie un fait, un événement ou un récit en en abolissant son contexte, son passé, sa connaissance et sa mémoire collective. Ainsi, la vidéo propose au spectateur de s’approprier l’histoire de Bangoura en reprenant son récit à la manière d’un karaoké. De cette manière, le récit relaté offre de multiples interprétations et peut aussi bien symboliser une génération de migrants cherchant à survivre, critiquer une société capitaliste, décrire le portrait d’une jeunesse française ou encore interroger la connaissance que nous avons de l’immigration française.

Qu’allons-nous retenir de l’histoire de Bangoura ? Comment allons-nous en parler ? Comment celle-ci va s’inscrire dans notre mémoire individuelle et collective ? sont des interrogations que tentent de soulever la vidéo.

L’œuvre joue sur la multitude des interprétations et des compréhensions qu’elle offre. Celle-ci se compose de trois éléments à la fois indépendants et connectés : La bande son, les images et les sous-titres :

  • La bande son qui a été composée à partir de samples extraits notamment de musiques traditionnelles issues de différentes vagues d’immigrations. Celle-ci se réapproprie en conséquence des musiques en en annihilant leur histoire, leur mémoire et leur sens.
  • Les images montrant deux jeunes gens entrain de mixer et de danser sur des morceaux de musique. L’agencement des images et du son peut laisser penser qu’Angela et Marius mixent la bande son et donc revisitent leur propre histoire de l’immigration.
  • Les sous-titres qui sont traités à la manière d’un karaoké. Le spectateur peut appréhender la vie de Bangoura à sa manière et y projeter ses propres réflexions.

 


Au-delà de la matière

Au-delà de la matière, de l’immuable au flexible, vidéo hd, 31 minutes, Couleur.

L’œuvre relate l’expérience de jeunes étudiants – militants du Génépi qui ont mis en place des ateliers photographiques auprès de détenus du centre pénitencier de Réau en Seine-et-Marne. Au-delà de l’apprentissage technique de la photographie argentique, ces rendez-vous hebdomadaires se sont révélés être des instants d’échanges informels mêlant joie, peine, incompréhension, consternation, révolte, déni, résignation et remise en question.

La vidéo met en perspective deux temporalités ou plutôt deux espaces temps différents qui se rencontrent : le premier, restreint et contraint, semble destiné à un futur inéluctablement déterminé tandis que le second, flexible et ouvert, semble explorer le champ des possibles. Au-delà de la matière ne cherche pas à questionner les conditions carcérales en tant que telles, mais plutôt à interroger les systèmes de domination qui se matérialisent et se consolident. La parole et l’image sont ici des médiums de rapprochement d’univers apparemment distincts et de dépassement des frontières.

Jouant sur l’imaginaire carcéral, l’œuvre s’ouvre sur une citation tronquée du détenu Elie Y. puis une musique hip hop saturée s’efface au profit des paroles des membres de l’association Génépi. La prison laisse place aux vécus. Les mots se juxtaposent et d’additionnent pour finalement revenir à la pulsation initiale, celle de la matière et du mécanisme. Les images, quant à elles, se superposent et se déclinent en trois perceptions de la prison. Apparaissent d’abord des images du « dedans », tournées et diffusées par des détenus de différentes prisons françaises. Puis celles du « dehors » : c’est à la lisière que je me tiens, par un plan fixe tremblant de l’entrée du bâtiment de Réau. Apparaît aussi l’« entre-deux », celui d’une jeunesse ouverte au champ des possibles, des militants-étudiants filmés au cours de leurs réunions en amont et en aval des sessions d’atelier auprès des détenus. Un jeu de cadre et de perspectives dessine une confrontation du « dedans » au « dehors », de vies semblant immuables à des vies encore flexibles, jusqu’à inscrire une confusion. Les visions ou espace-temps se confondent, les vies s’entremêlent … et pourtant une imperméabilité des univers semble résister.

MAGNUS

Magnus, vidéo hd, 9 minutes, Couleur.

Magnus est une discussion entre Jérémy et Yoann, anciens amis d’enfance. Les deux jeunes gens se retrouvent le temps d’une vidéo pour échanger sur le handicap vécu, le handicap perçu et sur ce qui les a probablement éloignés. 

Penser le handicap est un exercice qui s’avère plus complexe qu’il n’y paraît. Son approche a évolué au fil des siècles. Si les personnes handicapées étaient rejetées durant l’Antiquité, elles sont aujourd’hui l’enjeu d’une inclusion qui démontrerait la bonne éthique et la bonne morale de notre société. Néanmoins, comme le signifiait l’anthropologue Robert Murphy, la personne en situation de handicap est bien souvent maintenue sur le seuil de la société. Elle n’est ni à l’extérieur ni à l’intérieur de celle-ci. Elle l’accueille tout en la caractérisant et en la laissant dans une situation de liminalité. Le handicap est perçu comme une caractéristique qu’il faudrait réparer ou du moins, estomper. 

L’œuvre Magnus tente d’interroger notre perception du handicap et d’amener le visiteur à se questionner sur ses propres projections. La vidéo relate une partie de l’histoire de Jérémy, un jeune homme ayant subi un AVC au cours de son adolescence. Au-delà de son parcours de soin et des épreuves physiques que ce tragique accident lui a imposé, nous pouvons nous interroger sur la manière dont il a été maintenu dans cette liminalité que Robert Murphy évoque.

La vidéo ne s’inscrit pas dans la volonté de critiquer la société et sa perception du handicap. Elle relate, par un cas particulier, un questionnement sur le concept d’handicap. Un handicap est défini comme une limitation d’activité ou une restriction de participation à la vie en société due à une altération des capacités sensorielles, physiques, mentales, cognitives ou psychiques*. Ce mot peut trouver des substantifs pour le requalifier comme « invalidé », « empêché » ou autre. Toutefois, il est incontestable que cela amène un certain rejet ou un évitement qui révèle probablement les fissures de nos identités fièrement façonnées. La personne handicapée révèlerait-elle ce que nous masquons au plus profond de nous-même? Révèlerait-elle la multiplicité de l’être humain que nous préférons oublier ? Sommes-nous en mesure de regarder le handicap comme une partie intégrante de l’humanité ou non plus comme un fragment à recoller ? Sommes-nous en mesure de regarder Jérémy essayant de compenser ses handicaps lors d’un match de pingpong sans le tenir à la liminalité ?

Genèse

Genèse, vidéo 32 minutes, Couleur.

Derrière tout œuvre artistique, se cache un travail de recherche foisonnant, un parcours irrégulier fait d’avancées et de doutes. Mettant en perspective le travail de 2 artistes aux disciplines différentes, le film retrace ces moments d’improvisations, de répétition ou d’hésitations qui font partie intégrante d’une œuvre en devenir. Aux mouvements des danseurs hip-hop de la chorégraphe Anne Nguyen (en création de sa pièce Kata), se superpose une oeuvre musicale du musicien Les Gordon (du label Kitsuné), 2 univers qui, bien que différents, viennent se compléter pour créer une forme nouvelle et singulière.

Qu’il s’agisse d’une pièce dansée ou d’une œuvre de musique, l’impression d’aisance et de maîtrise que suscite la découverte de l’oeuvre aboutie est toujours flagrante. Quel processus de création derrière cette sensation de fluidité, de perfection ? Comment, d’une matière brute et spontanée, naît l’oeuvre future ? C’est par cet angle que le film tente de capter et de retranscrire la genèse d’une création artistique, nourri par les séances de travail et de répétition des danseurs, autant que par la l’oeuvre musicale composée sur le mode de l’improvisation.

Questionnement, tentatives, ajustements, répétitions… Autant d’étapes nécessaires que requiert la création d’un projet artistique, mouvement permanent oscillant entre la projection initiale de l’artiste et le projet en devenir, matière polymorphe et versatile. Miroir de cette genèse continue, le film finit par lui-même devenir objet de son propos.

Biographie

Biographie

Après avoir étudié la mécanique quantique au cours de son cursus universitaire, je me suis progressivement tourné vers la création artistique, en explorant les thèmes d’ordre implié et de résonance émotionnelle. Ces thèmes fondateurs vont dès lors déterminer ma démarche artistique et apporter une cohérence à l’ensemble de mes œuvres, aussi pluridisciplinaires soient-elles. En parallèle, je me forme à la réalisation de films en argentique à l’Etna et et de films-performance au California Institute of Arts (CalArts). Je poursuis mon parcours artistique en collaborant notamment avec les artistes new-yorkais Amos Poe et Nicole Nelch.

Mon travail émerge d’une vision du monde où tous les éléments sont reliés et interagissent entre eux. Chaque élément est, pour moi, une abstraction issue d’une totalité de mouvement fluide (telle la notion d’holomouvement). J’adopte une approche centrée sur l’individu pour ensuite en dégager une structure systémique en m’intéressant aux interactions qu’un individu peut avoir avec un lieu, une ambiance ou d’autres personnes.

En 2013, je réalise le film PERSON(A) – 65min-, composés de 23 portraits. Faire tomber le masque, retrouver son soi intime, tel est l’enjeu des personnes filmés. Chaque portrait est unique, et pourtant, quelque chose les relie. Ces portraits qui se répondent et s’entrecroisent finissent ainsi par se rejoindre dans un mouvement introspectif collectif.

En 2014, je rejoins l’expédition Tara Méditerranée entre les Embiez et Antibes (France), dans le cadre d’une résidence artistique qui donnera lieu à l’exposition collective Tara Méditerranée à la galerie du jour, en 2015.

En 2015, je travaille sur la transidentité avec les associations Trans 3.0 et ABC. Je prépare également une vidéo avec la cie de danse Par Terre (en résidence à Chaillot) sur la notion de création.

Schibboleth

SchibbolethVidéo 16 minutes, couleur – 2016

Etre réfugié est une acceptation spatiale d’un individu. Il a acquis l’autorisation de pénétrer au sein d’un espace délimité par des frontieres. Seulement, cette autorisation ne lui donne nullement acces a la société dans laquelle il devra vivre. Les personnes réfugiées ne possedent ainsi pas le fameux schibboleth(1) qui leur permettra de s’intégrer, de vivre et de s’épanouir au sein de leur nouveau territoire. La plupart d’entres-eux restent en périphérie de la société.

En collaboration avec l’association Singa France, j’ai souhaité m’intéresser aux personnes réfugiées qui ont la volonté d’apprendre la langue française et les différents codes sociaux nécessaires a leur intégration. Ainsi, pendant plusieurs semaines, j’ai été le témoin privilégié des séances de tutorat qu’ils ont suivi. Ces rendez-vous réguliers sont une maniere pour eux d’échanger et de partager leur quotidien. Ils permettent la création d’un lien de confance, qui facilite leur intégration culturelle et sociale.

(1) le mot schibboleth est une marque différentielle et un signal d’appartenance. Ce mot suffsait à différencier des populations entres elles. Ceux qui ne le prononçaient pas correctement, étaient exclus.